La gestion obligataire et son évolution récente dans le cadre d’une gestion à impact tangible
« Dans tous les pays, un grand nombre de personnes vivent sans perspective d’avenir meilleur. Elles sont sans espoir ni but ni dignité, spectatrices de l’ascension inexorable des autres vers une prospérité sans cesse grandissante. Dans le monde entier, beaucoup échappent à l’extrême pauvreté, mais bien d’autres encore n’ont ni les chances ni les ressources nécessaires pour prendre en main leur destin. Bien trop souvent, la place d’une personne dans la société continue d’être déterminée par son origine ethnique, son sexe ou la richesse de ses parents. »
En matière de développement durable, au cours des années précédentes nous nous sommes concentrés sur des investissements ayant un impact au niveau de la base de la pyramide économique, les personnes ne vivant qu’avec quelques dollars par jour. Dans le cadre de notre portefeuille d’impact, notre objectif a toujours été celui de générer un changement positif tangible sur le quotidien des pauvres et de leurs communautés. En particulier, nous voulions contribuer à faciliter l’accès au capital à ces personnes.
Cependant, afin de faire de notre gestion un vecteur de changement et de contribuer à résoudre ces nombreux problèmes sociaux, il nous fallait faire évoluer notre façon d’investir. Dans un premier temps, nous avons étudié la règlementation et identifié la marge de manœuvre qui se présentait à nous dans le cadre d’investissements en microfinance. Nous avons été rigoureux dans notre démarche en ne ciblant d’abord que des pays pour lesquels notre analyse du contexte politique et réglementaire confirmait le bon déroulement de l’activité de microcrédit. Par ailleurs, nos cibles d’investissements consistaient en des intermédiaires qui développaient quasi exclusivement un portefeuille de crédits à l’entreprenariat (par opposition au crédit à la consommation ou toute autre activité ne participant pas directement à la création de valeur).
Certains pays qui échappaient au radar de nos investissements plus traditionnels (obligataires souverains ou dette d’entreprises issues des pays émergents), ont intégré naturellement notre univers d’investissement à impact malgré l’absence d’un marché des capitaux mature. Ce fut le cas de la Bolivie, du Kirghizistan, du Sri-Lanka ou encore du Cambodge, par exemple.
L’univers de l’investissement à impact est peu comparable à celui des investissements obligataires « classiques ». Néanmoins, il permet de réaliser l’objectif de retour social avec une certaine précision en plus d’assurer un rendement financier minimum. Et notre capacité d’allier l’innovation financière, basée sur notre maîtrise des marchés des capitaux et de la structuration de véhicules d’investissements, à l’innovation sociale telle que développée et présentée par nos partenaires, nous a permis de générer et de nourrir un impact social en même temps que nous veillions à la réalisation d’un résultat financier ce, à la fois dans l’intérêt de nos investisseurs mais aussi des micro-entrepreneurs évoluant dans des milieux parfois aussi reculés que les campagnes sri-lankaises. Le temps passant, nous avons continuellement cherché à diversifier nos modes d’action ainsi que la nature de nos cibles d’investissement.
De fait, du microcrédit simple, nous avons progressivement élargi notre champ au financement de logements accessibles pour les pauvres, de matériels agricoles et plus récemment, nous nous sommes investis activement dans le financement de l’accès à l’énergie renouvelable pour ces mêmes populations.
L’avènement des objectifs de développement durable en 2015 a permis de mieux structurer notre démarche. A la lumière des événements de ces dernières années, qu’ils aient été d’ordres sociaux, environnementaux ou climatiques, nous sommes conscients, un peu plus, des inégalités créées par les modèles de croissance adoptés par l’ensemble des pays de la planète (de la Chine aux Etats-Unis). La multiplication des mouvements de protestation : les indignés, Occupy Wall Street, le soulèvement des jeunes en Tunisie, en Egypte, les gilets jaunes en France, etc... attestent de ce besoin de plus d’équité dans nos modèles de développement et donc dans nos solutions d’investissement.
Plus récemment, et grâce à cette initiative visant l’atteinte des objectifs de développement durable (ODD) à l’horizon 2030, nous assistons à une transformation lente mais réelle d’une classe d’actifs particulière : le marché obligataire. Les différents éléments évoqués supra et la volonté des gouvernements mais aussi et surtout de la société dans son ensemble, de rendre le développement plus équitable suscitent l’émergence d’une nouvelle catégorie d’investissements à savoir les green bonds. Ce terme générique renferme un nombre plus important de solutions à impact accessibles pour des acteurs et des véhicules d’investissement contraints par la réglementation sur l’utilisation d’instruments financiers éligibles pour leur portefeuille.
C’est naturellement que nous intégrons cette nouvelle solution pour compléter notre implication à la base de la pyramide économique. En utilisant les green bonds, nous parvenons à cibler différents types de projets pour la plupart traitant d’infrastructures ou de préoccupations environnementales et climatiques (ODD 11 et 13 par exemple, en complément des ODD 1, 3, 5, 7, 8 et 10 ciblés par notre portefeuille d’impact alternatif).
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Source de la citation dans l'introduction : Rapport sur le développement humain 2019, PNUD